6.8.11

Voyages: Lausanne, archi-suisse

Lausanne, archi-suisse
La Miroiterie respire. Cela dit sans métaphore : les murs du bâtiment, d'énormes coussins d'air lumineux, se gonflent et dégonflent imperceptiblement au fil des heures. Devant l'entrée, sur la place, une pergola au feuillage d'aluminium joue avec la lumière. Ici, une galerie à ciel ouvert essaime ses vitrines. Là, d'anciens entrepôts abritent des antiquités et des ateliers d'artiste. Plus loin, l'"Arbre de Flon-Ville" étend ses racines d'acier et ses branches de mélèze.
Niché au coeur de Lausanne, le quartier du Flon laisse imaginer l'équation compliquée qu'ont dû résoudre les artisans de sa reconversion : allier l'avant-gardisme architectural à l'histoire industrielle du lieu et aux préoccupations écologiques du temps. Il a fallu près de quinze ans et six projets pour que soit enfin transfigurée la friche malfamée qui faisait trembler les Lausannois. Pari gagné. Le nouveau Flon, "branché" dans les guides, "vivant" pour les habitants, résume à merveille ce qu'un hôtelier du coin nomme la "suissitude". Un esprit contemporain chevillé au culte de la douceur de vivre et aux matériaux du cru.
Suisse peut-être, lausannoise sans doute. La ville, trop facilement caricaturée en avatar bucolique de Genève, se crée peu à peu un visage nouveau. Celui du Rolex Learning Center, inauguré en janvier sur le campus universitaire. Un mirage en forme de vague, tout ouvert sur l'extérieur, où la lumière se décline du blanc étincelant au gris pâle. Celui de l'école de musique, dont les escaliers et verrières Art déco s'associent à des lignes et à des mobiliers épurés. Ou encore de l'Ecal, une des écoles de design les plus prisées d'Europe. Bernard Tschumi, architecte de la Villette, l'a établie dans une ancienne usine de bas Nylon dont elle magnifie les espaces. Le Projet bleu devrait, lui, transférer le Musée cantonal dans un hangar ferroviaire entouré d'herbes folles.
Ces touches d'ultramodernité vont d'autant mieux à Lausanne qu'elle est de bric et de broc. Les escaliers couverts de la cité médiévale débouchent sur le musée d'Art contemporain et ses collections de verre, une flânerie au bord du lac mène du siège de Philip Morris au Béjart Ballet, la collection de l'art brut créée par Dubuffet a des airs de chalet au milieu du béton. On dégringole du bois de Sauvabelin, sur les hauteurs, aux vignes en terrasses au bord du Léman. Le mariage parfait entre carte postale suisse et audace architecturale.

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