Christian Saint-Etienne est membre du Conseil d'analyse économique auprès du Premier ministre et professeur d'économie au Centre national des arts et métiers. Dès 2009, il pointait dans «La fin de l'euro» les déséquilibres structurels de la monnaie unique.
Selon lui, la zone euro n'est plus viable dans sa forme actuelle. A défaut d'une fédéralisation, une sortie de l'Allemagne serait la «meilleure» solution.
Selon vous, quels problèmes pose l'euro dans sa forme actuelle?
La zone euro a un problème structurel: elle regroupe des pays qui n'ont rien à faire dans la même zone monétaire. D'une part, les pays du nord, l'Allemagne, les Pays-Bas, l'Autriche, qui ont choisi un modèle industriel exportateur ; de l'autre, les pays du sud, France, Italie, Espagne etc., et leur modèle de consommation, tiré en France par la dépense publique. Les premiers, en raison de leur industrie forte, ont les moyens de rester compétitifs avec un euro à 1,5 dollars. Les autres ne le sont plus au-delà de 1,3 dollars. Ce divorce s'est aggravé avec la crise de 2008. L'euro ne peut plus continuer tel qu'il est.
Que préconisez-vous?
La solution idéale serait de fédéraliser la zone, ce que les Allemands refusent. Il s'agirait d'une fédéralisation partielle, à 9, regroupant France, Bénélux, Allemagne, Autriche, Italie, Espagne, Portugal. On laisse aux Grecs un euro qui, du coup, sera dévalué. Et on crée un «new euro», avec un gouvernement économique et un vrai budget fédéral à 7 ou 8% du PIB. Ce dernier permet de redistribuer de l'argent entre les pays-membres pour compenser leurs différences de structure économique. La banque centrale reste indépendante, même si on peut imaginer de réécrire Maastricht pour lui donner, en plus de son mandat de stabilité des prix, une mission de croissance économique. Une telle zone deviendrait la deuxième puissance du monde. Mais soyons clair: la probabilité d'un tel scénario est quasi-nulle.
Alors quels sont les autres scénarios?
Soit les pays du sud adoptent le modèle du nord, ce qui techniquement est impossible avec un euro à 1,4 dollars. Il faudrait qu'il baisse, mais ce n'est pas dans l'intérêt de l'Allemagne. Soit les pays du nord sortent de l'euro. Dans ce cas, la dévaluation devient possible. On est en train d'en approcher. L'attaque sur la dette de l'Italie préfigure sans doute la même chose contre l'Espagne et la France.
Liberation
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