7.8.11

"Cauchemar" en Nouvelle-Calédonie


Nouvelle calédonie

Quatre personnes ont été tuées par balles, samedi, sur l'île de Maré.
La peur était palpable dans la voix des habitants de Maré, hier soir au téléphone, au terme d’une journée qui a subitement transformé un conflit social en conflit armé. Située à près de 200 km à l’est de la Grande Terre et de la capitale Nouméa, cette île de 6.000 habitants est touchée depuis deux semaines par un blocage de son aérodrome, initié par des salariés de la compagnie Air Calédonie et amplifié par des usagers en colère. Regroupés au sein d’un comité contre la vie chère, ces derniers protestent contre la hausse des tarifs d’"Aircal", société publique qui assure seule la desserte aérienne de l’île.
Vendredi, une délégation de 250 membres de la tribu de Nétché est venue s’opposer à ces 80 manifestants. Objectif : défendre la nouvelle politique tarifaire d’Air Calédonie, dont le directeur général n’est autre que Nidoish Naisseline, le grand chef de leur tribu. Après un round d’observation et de négociations, les deux camps se sont retrouvés hier et la situation a explosé. Barrages, jets de pierres, commerces incendiés et saccagés. Puis l’affrontement, entre deux tribus armées de fusils de chasse, de haches et de coupe-coupe agricoles. Un homme de 20 ans a été abattu d’une balle en pleine tête en début d’après-midi, avant que le bilan s’alourdisse pour atteindre hier soir 4 morts et 23 blessés. Dans le même temps, un collège et six logements de fonction auraient été incendiés dans la tribu de Tuo, au terme d’un mariage qui aurait dégénéré.

"Malaise social"

Représentant de l’État dans cette collectivité du Pacifique, le haut-commissaire de la République, Albert Dupuy, a évoqué "une journée de cauchemar" à Maré. En attendant son arrivée ce dimanche, une centaine de gendarmes mobiles ont été envoyés en fin de journée pour ramener le calme sur l’île, qui ne compte ordinairement que cinq gendarmes. Le grand chef Nidoish Naisseline a aussi pris place à bord de l’avion militaire pour appeler ses sujets à rentrer chez eux et à ne commettre aucun acte violent. "C’est un personnage influent", estimait hier soir un habitant de l’île. "Sa parole est écoutée et respectée, cela devrait favoriser un retour au calme."
À Paris, moins de trois semaines avant le déplacement de Nicolas Sarkozy en Nouvelle-Calédonie, la situation est prise très au sérieux. La ministre de l’Outre-Mer, Marie-Luce Penchard, a interrompu ses vacances en Guadeloupe et convoqué une réunion de travail qu’elle présidera ce matin à son ministère, avant une conférence de presse à midi. Le PS a pour sa part souligné un "profond malaise social" en Nouvelle-Calédonie et appelé le chef de l’État à "prendre sans délai des mesures urgentes et fortes de soutien économique et de rééquilibrage afin d’éviter à tout prix l’explosion sociale".
Yann Thompson - Le Journal du Dimanche

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